Gnathonemus Petersii
Poisson-éléphant

Famille : Mormyridae

Habitat : Rivières d'Afrique occidentale et centrale.

Description : Poisson a corps plat et tout en longueur. Sa coloration est noire avec des tendances bleu anthracite ou brun sombre. Au niveau de ses nageoires dorsale et anale, très en arrières du corps, se trouve un dessin plus clair en forme de parenthèse. La nageoire caudale est en forme de V. L'orifice buccal, rond d'un diamètre d'un millimètre, est situé au-dessus du rostre buccal prolongeant la mâchoire inférieure. Leur queue est le siège d'un organe électrique leur permettant de se diriger et de repérer leurs proies. Le rostre est un appendice tactile permettant de fouiller dans le sol. L'œil est rond et vitreux et brille comme ceux des chats dans l'obscurité. Il est à noter que ce poisson est fort probablement doté d'une intelligence supérieure et le ratio poids du cerveau/poids total est fortement inhabituel (3.1%). 60% des besoins en oxygène du poisson sont utilisés par son cerveau (contre 20% chez l'homme !).

Taille : Jusqu'à 35 cm à l'age adulte mais seulement 25 cm en aquarium.

Différences Sexuelles : Le mâle a une échancrure à la limite de la nageoire anale avec le corps. Chez la femelle ce bord est droit. Si on caresse cette nageoire chez le mâle mature, on obtient une ondulation de la nageoire.

Température : Entre 25 et 28°C

pH : 7.0, eaux très douces dans lesquelles leur système électrosensorimoteur est plus performant.

Eclairement : Poisson nocturne, se cache durant la journée, sauf si la lumière est faible ou tamisée par des plantes flottantes.

Sol : Sol mou, idéalement du sable fin de rivière afin qu'il n'abîme pas son rostre.

Décor : Le décor doit fournir de nombreuses cachette (pierres, racines, ...) et se rapprocher d'un décor de rivière. La végétation doit être dense et des plantes flottantes doivent filtrer la lumière qui ne doit pas être directe. Il faut un bac d'au moins 300L pour qu'ils se sentent bien.

Nourriture : Ces poissons n'acceptent pas de nourriture en flocons ou granulés, ils mangent principalement des vers de vase, des larves de moustiques, des tubifex, des artémias et des daphnies vivants. Ils ont, semble-t-il, une vue médiocre et ils repèrent la nourriture très lentement (entre 20 s et 3 mn sont souvent nécessaires, on m'a toutefois reporté qu'ils allaient plus vite que les cichlidés pour manger des artémias et des daphnies). Il est donc indispensable de les nourrir toujours au même endroit dans un endroit peu accessible aux autres poissons et de veiller à ce qu'ils ne soient pas dérangés durant leur festin. Ils acceptent également en remplacement de la nourriture vivante, du surgelé (vers de vase décongelés préalablement). On peut, provisoirement, leur donner des vers de vase rouge séchés à condition de les mettre dans une coupelle (5 cm de diamètre) renversée et plantée dans le sol (car ces poissons ne s'alimentent pas en surface et la nourriture séchée flotte !). Enfin, il est préférable de les nourrir le soir car se sont des poissons nocturnes.

Reproduction : Ces poissons ne se reproduisent pas en aquarium, certains Mormyridae ont pu être reproduits mais cela reste toujours très délicat.

Comportement : C'est un poisson nocturne (peu actifs le jour), territorial et individualiste qui doit avoir sa propre cachette. Il peut être maintenu dans ces conditions soit tout seul, soit en petit groupe d'au moins 6 exemplaires. En plus petit nombre, il est possible que l'individu dominant chasse inlassablement les autres individus, plus faibles, jusqu'à leur mort. Ils passent leur temps (lorsqu'ils ne se cachent pas) à fureter, le rostre contre le sol, en quête de nourriture. Ils aiment se déplacer dans des anfractuosités ou des galeries. Ce ne sont pas des poissons très vifs bien qu'ils sachent nager avec dextérité. Lorsqu'ils sont immobiles, on peut observer leur arrière-train qui dodeline en permanence.

Leur air placide leur donne une image très sympathique. Pacifiques, ils sont néanmoins capables de chasser rapidement un congénère qui s'est aventuré près leur antre. S'ils aiment se cacher ce ne sont pas pour autant des poissons peureux : la lumière et les vibrations ne les effraient pas trop (ils ont une mauvaise vue et une mauvaise ouie). Il arrive, lorsqu'on les change de bac, qu'ils se dressent sur leur queue comme des dauphins (auxquels ils ressemblent un peu d'ailleurs) dans ce cas, attention aux chutes hors de l'eau qui leur seront mortelles. Il est donc prudent d'avoir un bac fermé. En temps normal ils évoluent dans la moitié inférieure du bac. Autre point commun avec les dauphins, Ils sont capables d'apprentissage et de comportement qui rappellent le jeu. Si vous tapotez systématiquement sur l'aquarium, ou vous leurs parlez, ou allumez une lumière etc. avant de les nourrir, ils apprendront à réagir à cet appel !

Compatibilité : Peut éventuellement cohabiter avec des espèces calmes, pacifiques, lentes et pas trop avides de nourriture. Ne doit pas être maintenu avec d'autres poissons de fond. Il est néanmoins très fortement conseillé de le maintenir en bac spécifique et d'avoir une bonne expérience en aquariophilie : C'est un poisson d'expert à bannir absolument pour les débutants (n'oubliez pas qu'il se nourrit presque exclusivement de vers vivants ou, au pire, surgelés).

Médicaments : Attention ces poissons ne supportent pas la plupart des médicaments que l'on utilise en aquariophilie comme le vert de malachite. C'est pourquoi il est préférable de les maintenir dans un bac réservé à cet usage (ou en tout cas de posséder un bac hôpital).

Notes : Les poissons-éléphants sont des poissons charmants et étonnants mais hélas très délicats et émotifs. Ils ne sont donc pas conseillés aux débutants et même aux passionnés car pour un individu en vente (ils ne se reproduisent pas en aquarium) des centaines ont été massacrés afin d'en capturer un vivant. Lors de l'achat, il est préférable de prendre les individus les plus dodus, ceux ayant un corps aplatis peuvent être des individus affaiblis ayant cessés de se nourrir. Ils ont néanmoins un grand intérêt scientifique et font l'objet de nombreuses études de part le monde. Voir le dossier de vulgarisation scientifique à ce sujet. Ils sont également utilisés dans l'industrie car leur état de santé indique immédiatement la qualité de l'eau dans laquelle ils évoluent. L'intérêt que l'on porte souvent à ce poisson, outre son allure étrange qui fait de lui une curiosité en aquariophilie, est l'organe électrique qu'il possède dans sa queue. Cet organe n'a pas encore révélé tous ses secrets et fait l'objet de nombreuses recherches à travers le monde. D'une manière générale, ce poisson est passionnant et fort méconnu des aquariophiles.

Notez également que le poisson-éléphant ne nécessite pas une forte oxygénation de l'eau, il peut au contraire vivre dans des endroits à très faible concentration en O2 dans ce cas son métabolisme s'adapte à l'oxygène disponible.

Organe Electrique

L'organe électrique du poisson éléphant se situe dans son pédoncule caudal. Les récepteurs se trouvent quant à eux proche de la tête de l'animal. Cet organe électrique intéresse beaucoup de chercheurs à travers le monde et trouve des applications militaires ainsi qu'en médecine. Nous allons exposer ici quelques résultats de recherche. La principale fonction de cet organe électrique n'est pas l'attaque (le Gnathonemus Petersii est un poisson électrique à faible courant) mais un sens supplémentaire lui permettant de se repérer dans les eaux sombre et boueuses ainsi que de repérer ses proies. Les décharges électriques qu'ils émettent sont également un moyen de communication entre les individus Gnathonemus Petersii.

Quelques chiffres

Fréquence des impulsions : De 5 à 50 fois par seconde.

Durée de l'impulsion : 1 milli-seconde environ.

Amplitude des impulsions : De 5 à 20V au contact du poisson et entre 1 et 200 mV dans l'eau.

Puissance des impulsions : Quelques milli-watts.

Danger : Aucun pour l'homme, même en contact direct avec le poisson.

Ces impulsions sont invisibles mais Il est possible de les transformer ces en quelque chose d'appréciable par des humains. On peut ainsi les transposer vers de l'audio ou les afficher sur un oscilloscope.

Il est possible de réaliser soi-même ces transpositions. Exemple simple d'expérience mettant en évidence les décharges électriques :

Avec l'amplificateur d'une chaîne HIFI. Trempez deux fils dénudés écartés de 2 cm, connectés à l'entrée microphone de l'amplificateur, directement dans l'eau à proximité des poissons. En réglant le volume sonore, il est possible d'entendre des crépitements qui sont en fait les décharges impulsionnelles transformées en son. Le bourdonnement continu du 50Hz peut être supprimé en mettant l'aquarium à la masse, ou en éteignant les équipements électriques de l'aquarium (néons, chauffage, pompe, ...).

Déplacements nocturnes

Les impulsions électriques générées par le poisson ont un rôle de "sonar". Le principe général est simple à énoncer : chaque objet (qui possède une résistance et une capacitance) se trouvant dans le champ électrique généré par l'impulsion provoque une distorsion de ce champ. Le poisson possède des capteurs permettant d'évaluer cette distorsion. La position de l'objet est évaluée en orientation et en distance.

L'orientation est donnée grâce aux récepteurs : le flanc qui enregistre la plus grande distorsion indique si l'objet se trouve à la droite ou à la gauche du poisson. L'orientation précise de l'objet est trouvée par une évaluation de la direction de la perturbation. Enfin, la distance de l'objet est donnée par une évaluation de la force et du focus de la distorsion.

Le monde en trois dimensions qui entoure le poisson est perçu comme une "projection" en deux dimensions de ce monde sur son corps. Il semblerait donc que la position d'un objet soit perçue comme un point plus ou moins intense et flou sur le corps du poisson. L'image perçue n'est donc pas sans ambiguïté. Ceci est en partie résolu par le fait que le flanc opposé à l'endroit ou se trouve l'objet est tout de même stimulé (faiblement) et apporte donc des informations supplémentaires mais insuffisantes néanmoins pour restituer une position en trois dimensions.

Comme pour la vision binoculaire, une deuxième source d'information est nécessaire pour localiser les objets : c'est sûrement le but du mouvement permanent de la queue du poisson. Les divers angles qu'elle adopte offrent une multitude d'images supplémentaires (elle aussi en deux dimensions). En recoupant toutes ces informations, le poisson arrive à constituer une image en trois dimensions de son environnement.

De même, le poisson arrive à déterminer ce qui bouge de ce qui est fixe en comparant deux "images" successives. La perception passive du faible champ électrique produit par les autres poissons (et proies) est une information intéressante.

Recherche de nourriture

La recherche de nourriture utilise les nombreux sens disponibles du poisson. L'usage des impulsions électriques est le sens majeure dans le noir ou dans un environnement complexe et inconnu. Mais lorsque c'est possible, la vision devient le sens dominant. Toutefois certains poissons n'apprécient pas du tout la lumière et ne sortent pas de leur cachettes les soirs de pleine lune. En captivité, cette peur de la lumière peut disparaître si l'on habitue le poisson à se nourrir lorsque la lumière est allumée.

Dans un environnement sombre où les impulsions électriques sont inefficaces, le poisson se base alors sur les mouvements de ses proies. Ces mouvements sont perçus par des capteurs situés le long de la ligne latérale du poisson. Il est également en mesure d'évaluer les caractéristiques électriques des proies (c'est à dire leur résistance et leur capacitance). Il distingue ainsi aisément les objets inanimés des autres et identifie le type de la proie. Gnathonemus Petersii utilise également le toucher de son rostre ainsi qu'une analyse chimique pour déterminer la nature de sa proie.

Evidemment, lorsque c'est possible, le poisson-éléphant utilise au mieux tous les sens qu'il dispose pour trouver ses proies rapidement. Mais chaque individu possède sa propre stratégie qui favorise tel ou tel sens en fonction de l'environnement et de son expérience.

Communication entre poissons

Lorsque deux poissons émettant des fréquences similaires entrent dans la même zone, chaque poisson adapte sa fréquence, évitant ainsi des interférences gênantes. L'un des poissons augmente sa fréquence tandis que l'autre l'abaisse.

La nature de l'émission électrique dépend du sexe de l'animal. Ainsi, un poisson, en analysant l'émission d'un autre, connaît son sexe mais également son espèce et peut-être même l'identité de ce dernier. Chaque poisson a la possibilité d'indiquer aux autres son humeur (agressivité, bonne humeur, ...) en changeant les caractéristiques de ses impulsions.

Références/Bibliographie

Laboratoire de Biologie du Comportement SHS - Grenoble
The Company of Biologist Limited
ELEKTROLOKATION
Nature
21st Century Biology
Régulation de l'autoactivité des électrorécepteurs du Mormyre

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Dernière mise à jour : 24 Juin 2002

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